APPARTEMENT D'ESTEBAN ET SKYLER ALDRIDGE,
EAST END.
Jimmy Page. Ou l’un des meilleurs guitaristes au monde selon Skyler Iziliz Aldridge. Elle ne vénérait pas un quelconque Dieu, un mec imaginaire ayant soit disant construit tout ce qu’il y avait autour d’elle. Elle, elle croyait en la musique, et au talent. Elle croyait au talent de ce mec-là. Elle croyait au talent de Richards, de Jagger et de Hendrix. Et plus que tout, elle croyait en son talent. Parce qu’au risque de passer pour une fille prétentieuse, elle savait et avouait volontiers qu’elle était douée, affreusement douée avec une guitare entre les mains.
« Sky’ ? » le morceau qu’elle jouait recouvrait sa voix. Lorsqu’elle avait sa guitare entre ses mains, Skyler était tout simplement déconnectée de la réalité. Esteban attendit quelques minutes et voyant que sa sœur n’avait toujours pas remarqué sa présence il attrapa l’un des coussins posés sur la chaise la plus proche. Il le balança. En plein dans le mile. La jeune Aldridge se retourna, furax, se demandant qui avait osé la déranger pendant son morceau.
« Je peux savoir ce qu’il t’arrive ?! » Son frère lui sourit, amusé. Sauf qu’elle ne trouvait rien de drôle.
« T’es pas censée être en cours ? » « J’ai fini plus tôt » répondit-elle du tac au tac. Son frère haussa un sourcil.
« T’as pas une autre connerie dans le genre Sky ? » Elle rigola. Bordel il la connaissait plutôt bien. Elle n’avait pas fini plus tôt, du moins pas officiellement. Elle avait elle-même arrangé son emploi du temps.
« Vu la gueule que tu tires… Je vais avoir le droit à une leçon de moral ? » Esteban soupira avant de s’avancer un peu plus dans la chambre de sa sœur.
« Ecoute, on en a déjà parlé, t’as du talent ! Fous pas tout en l’air… » Skyler posa machinalement sa guitare sur son lit avant d’attraper son paquet de clopes. Elle savait qu’il avait raison, seulement se raisonner, c’était au-dessus de ses forces. Elle savait que si elle voulait s’en sortir, avoir du fric et tout ça, il fallait qu’elle bosse, à fond, mais surtout qu’elle commence à faire un minimum d’efforts. A commencer par aller sérieusement en cours. Oui elle était passionnée par la photo et elle était réellement douée, mais suivre les cours étaient un peu trop... ennuyant à son gout.
« Je sais. » répondit-elle finalement tout en allumant sa cigarette.
« Je m’y mettrais… sérieusement. » « Tu me dis ça à chaque fois. » Une nouvelle fois, la jeune femme sourit, amusée.
« Et bah ça finira par être vrai. »- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
SKYLER & LIAM,
PARC DE L'UNIVERSITE.
Adossé au grand saule, Liam jouait les mannequins amateurs pour la jeune Aldridge. En plus d’être beau garçon et franchement bien foutu, il avait un charme indéniable. C’est pour cette raison que Skyler ne s’arrêtait plus de le shooter, et visiblement ça semblait l’amuser. Bien qu’aujourd’hui il semblait plus d’humeur à se plaindre qu’à rigoler.
« Arrête de te plaindre… elle t’aime. » Il leva les yeux au ciel.
« C’est ça. » « Sérieusement. Ta mère est toujours chez toi, à t’emmerder, à te prendre la tête… Donc ouais, elle doit tenir à toi. Un minimum. » Skyler était toujours l’œil dans son appareil à shooter son ami. Un des meilleurs modèles qui soit selon elle. Et visiblement son professeur semblait apprécier ces photos.
« … J’peux te poser une question ? » « Vas y » répondit-elle sans lever le nez de son appareil photo.
« Tu parles jamais de tes parents… Alors je… » Sans lui laisser le temps de continuer, la jeune femme le coupa, relevant la tête par la même occasion.
« Ma mère s’est barrée quand j’avais un an. Et mon père… Hum il ne s’en est jamais vraiment remis, et il était alcoolique. Alors on s’est barré. Mon frère et moi. On est juste… Parti. » Le silence s’installa pendant quelques instants. Lorsque Skyler daignait parler de son histoire, de sa famille, ça avait toujours tendance à produire le même effet. Un long silence gênant. Enfin pas pour elle, mais pour son interlocuteur. Elle s’y était habituée. Mais elle ne supportait pas la pitié que ça pouvait engendrer.
« Je suis désolé Sky, j’savais pas… » « C’est pas grave. Enfin tu sais… J’avais un an. Je m’en souviens pas, elle est peut-être morte que je le saurais même pas. Et sincèrement, ça me ferait ni chaud ni froid. Elle s’est barrée, elle a fait son choix. Pour ce qui est de mon père… C’est la vie. Mon frère a voulu prendre la nôtre en main. J’sais pas si j’aurais eu la force de me barrer s’il n’avait pas été là… Mais ça va… Je fais ce que j’aime, de la photo, de la guitare, je suis en vie. Ca pourrait être pire. » Liam fixait la jeune Aldridge, sans doute ne savait-il pas quoi dire face à tout ce qu’elle venait de lui sortir. C’était compréhensible. Elle-même n’aurait su quoi répondre si la situation avait été inversée. Elle se contenta de lui sourire. Un de ses sourires francs, sincères mais affreusement rares.
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SKYLER & AMBER,
COULOIR DE L'UNIVERSITE.
« Izzie !! Attends, il faut qu’on parle. » Skyler ralentit sa marche, avant de s’arrêter. Elle aurait pu reconnaitre cette voix stridente parmi toutes les autres. Et bordel qui était-elle pour se mettre de la surnommer Izzie. Seuls les gens, vraiment, proches d’elle pouvaient se permettre de la surnommer ainsi. Et aux dernières nouvelles, Amber n’entrait pas dans cette catégorie. Une jolie blonde, dans le genre un peu trop jolie et beaucoup trop superficielle, se posta devant la jeune Aldridge, tout sourire.
« J’ai besoin de toi ! » Skyler la dévisagea.
« Parce qu’on est amie maintenant ? » Amber fit une moue d’enfant, comme si elle avait été vexée par ses paroles. Pourtant, il n’y avait pas de quoi. Elles n’avaient jamais été amies, et ne le seraient jamais. Cette poupée barbie avait un peu trop tendance à se servir des gens pour qu’une réelle amitié ne naisse entre elles.
« Dis pas de bêtises… Ecoute, je sais que t’es amie avec Liam… Ca te dérangerait pas de nous arranger un rendez-vous… Enfin tu lui parles de moi, et tout ça quoi… » Le visage de Sky se décomposa, visiblement cette fille ne comprenait rien, ou ne voulait rien comprendre, puis finalement elle éclata de rire.
« Nan mais t’as quel âge ?! Tu peux pas te démerder toute seule ? J’ai l’air d’être une agence matrimoniale ?! Je crois que t’es assez grande pour aller le voir toi-même. Et si tu voulais passer par mon intermédiaire pour lui demander un rendez-vous… C’est qu’au fond, t’as peur qu’il refuse. Et tu sais quoi ? T’as raison. Jamais il ne sortirait avec une fille comme toi. » Amber semblait encaisser les paroles quelques peu blessantes de sa soi-disant… amie. Skyler tenait à remettre les choses au clair, ce qui ne semblait pas plaire à son interlocutrice.
« Je peux savoir ce que tu sous-entends par une ‘fille comme moi’ ? » La brune sourit, comme désolée.
« Je veux bien que tu sois blonde, mais quand même… Je veux dire les filles superficielles dans ton genre, dénuées de toute matière grise. Ca tu vois, ça l’intéresse pas vraiment Liam. Maintenant, tu m’excuseras, mais j’ai à faire. » Alors que Skyler contournait Amber pour continuer sa chemin, cette dernière reprit la parole.
« T’es vraiment qu’une sacrée conne Aldridge ! » Celle-ci se retourna, amusée, avec un sourire sur les lèvres.
« Tu vois, quand tu veux tu sais être franche… Finalement, t’es peut-être pas un cas si désespéré que ça. » dit-elle en reprenant une fois de plus sa route. Mais c’était sans compter sur l’énervement d’Amber, qui visiblement n’en avait pas fini avec elle. La jeune femme attrapa le premier objet à sa portée, une canette vide, et la balança au loin, visant parfaitement la tête de Sky. Cette dernière s’arrêta, portant sa main à son crâne, comme pour vérifier que tout allait bien. Plusieurs personnes s’étaient retournées, se demandant qui avait bien perdu l’esprit pour ouvrir les hostilités de la sorte avec Skyler. C’était une chose à éviter. Elle prit alors le chemin inverse, se dirigeant droit vers l’étudiante, qui semblait désormais se demander ce qui avait bien pu lui passer par la tête pour faire une tel geste. La jeune Aldridge la colla violemment contre le mur, son visage à quelques centimètres du sien.
« Ca… Tu l’as fait une fois. Tu l’feras pas deux fois. Mais si par hasard tu me retouches, je t’éclate Amber. Et crois moi, ceux ne sont pas des paroles en l’air. Je t’éclate. Si t’ose m’adresser la parole une fois de plus, ne serait ce que pour me demander un stylo, une feuille ou je ne sais quelle connerie, je ferais de ta vie un enfer. J’ai été assez claire ?! » La blonde hocha la tête, tandis qu’un sourire s’affichait sur les lèvres de Sky.
« Bien. » Et sans ajouter un mot de plus, elle partit en direction du parking, où Esteban l’attendait.
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« Miss Aldridge est une personne pour le moins… complexe et difficile à cerner. Mais néanmoins intéressante. Cette jeune femme a des capacités énormes. Elle est intelligente, brillante, et je pense même pouvoir dire qu’elle a une certaine soif de connaissances. Le problème… C’est sa fainéantise. Elle a des facilités et elle en profite, elle ne fait que le stricte minimum alors qu’elle pourrait faire beaucoup plus. C’est vraiment dommage. Enfin si ce n’était que ça… Beaucoup de mes collègues ne partagent pas mon engouement pour miss Aldridge. Ils ne voient que son arrogance et son insolence. Je ne pense pas m’avancer en disant qu’elle a un réel problème avec l’autorité. Ce qui ne passe pas toujours avec mes collègues. Ce qui, encore une fois, est fort dommage. Elle a un potentiel tellement énorme qu’il est vraiment regrettable de la voir le gâcher ainsi. »
PROFESSEUR DE LITTÉRATURE ANGLAISE.« Je connais Skyler depuis plusieurs années, et il est difficile de la cerner. Il ne faut pas s’arrêter à ce qu’elle veut bien vous montrer… Oui elle est chiante, oui c’est la reine des emmerdeuses, elle est cassante, sarcastique et sacrément insolente… Mais faut voir au-delà. Je vous assure que c’est aussi une fille douce… enfin quand elle ne la cherche pas. Et c’est la fille la plus attentionnée que je connaisse… Mais faites en sorte qu’elle ne sache jamais que j’ai dit ça. On a été ensemble pendant plusieurs mois… Et je l’aimais autant que je ne pouvais la supporter, enfin on avait, et on a toujours une relation assez étrange, indescriptible. Mais rien n’est simple avec Sky’. »
SORROW A. JEFFERSON.